Après une courte nuit à Rangoon, je me suis envolée pour Mandalay. La découverte de l'aéroport made in Burma vaut déjà le coup d'oeil: déserté par les touristes, l'enregistrement se fait à la main, mon bagage part sur le dos d'un stewart, on me colle un bel autocollant de la compagnie sur mon tee-shirt, et hop on m'envoie en salle d'attente. J'ai longtemps cherché un petit écran informatique pour savoir à quelle porte je devais embarquer... En fait, à chaque décollage, un monsieur crie le numéro du vol (également écrit sur un panneau) dans la salle d'attente! Je monte dans un joli navion et je me rends compte qu'il fait au moins 3 escales à chaque fois: les hélices tournent, les passagers descendent, montent et ça redécolle! Pour ce premier vol, mon étape est la 1ère du plan de vol.
Georges Orwell, auteur d'Une histoire birmane, a été soldat pendant l'occupation britannique et il parlait de Mandalay comme la ville aux 5 P : "porcs, prostituées, pagodes, parias, prêtres". J'avoue n'avoir pas vu les prostituées mais cela vous met tout de suite dans l'ambiance de cette ville, au centre du pays, située à 650 km de Yangon et qui fut la dernière capitale de l'empire birman. Posée près du fleuve Irrawaddy, j'ai adoré séjourner 3 jours et arpenter la ville à vélo (merci à la Chine pour l'expérience acquise pour slalommer!). Mention spéciale à ma GH et ses charmants proprios: le Peacock Lodge!
Vous n'échaperez pas à une petite leçon d'histoire: lorsque Bouddha se balada dans le coin, il décréta que pour son 2400 e anniversaire, une ville serait conscruite aux pieds de la colline de Mandalay, ce que fit le roi Mindon en 1857. C'est dans la région (à Pakokku pour être exact) que débuta la Révolution safran des bonzes en 2007 pour manifester contre la hausse du prix des carburants. Elle fut réprimée dans le sang très rapidement par la junte. Condamnée par l'ONU, cette répression a conduit à isoler le pays encore un peu plus avec l'UE, les US et le Canada qui ont durci les sanctions économiques à l'encontre de la Birmanie.
La visite de la ville débute par la colline de Mandalay et les très beaux temples qui l'environnent. Au sommet, après avoir crapahuté pieds nus 1700 marches en esquivant chiens, chats, fidèles et petits temples, on surplombe des toits dorés, le palais et l'Irrawaddy. C'est magique. J'ai commencé à découvrir le bouddhisme à la birmane avec des temples parfois très kitsch avec leurs Bouddhas surmontés d'une auréole lumineuse comme à Las Vegas et des mosaïques qui parfois tiennent de la salle de bain clinquante. Mais cela confère un certain charme car les Birmans aiment ce qui brille et sont modernes dans leurs pratiques religieuses!
Un peu plus loin se trouvent les pagodes KUTHODAW (le plus grand livre du monde!) et SANDAMUNI. Elles datent toutes deux du XIXe siècle et se composent d'une multitude de petites stupas blanches. Quant à la première, elle tient son surnom des 729 stèles d'albatre cachées dans les stupas qui s'y trouvent. Il s'agit du canon (règles des décisions solennelles) bouddhique élaboré sous le roi Mindon en 1860. Il faudrait 450 jours, en raison de 8h/jour pour finir ce très gros livre! L'ambiance au coucher du soleil est vraiment "spirituelle" et calme au milieu des personnes venues prier à la fin de la journée.
Tout près se trouve également la pagode KYAUKTAWGYI que j'ai vraiment aimé, tant pour son bouddha en marbre qui a nécessité 10 000 personnes pour le transporter, que pour tous les animaux qui s'y baladaient, l'absence de touristes, les vendeurs et les moines concentrés sur un match de foot (les Birmans sont de grands fan de foot! Surtout Manchester United et je les comprends. Ils peuvent vous citer des villes françaises en ayant lu les résultats sportifs. Ainsi ils peuvent connaître l'OM mais pas Marseille :)...
Bouddha de marbre
Mon coup de foudre pour Mandalay tient également à tous les moines aux robes pourpres, safran, orange, incarnats, rouges qui se promènent en ville.
Les monastères de bois m'ont aussi subjugués comme celui de SHWE NANDAW que j'ai aperçu de l'extérieur car je refusais de payer le ticket combiné de 10 dollars. Tout en teck (bois précieux, très présent en Birmanie, qui possède 90% des réserves mondiales, mais qui conduit à un gros problème de déforestation), le toit est finement ciselé et les portes admirablement sculptées. Le très beau monastère de SHWE IN BIN se visite sans ticket et il est déserté des circuits touristiques (il n'y a pas non plus foule encore en Birmanie). Construit sur pilotis en 1895, les portes et les frontons sont sublimes. Magnifiés par l'ambiance tamisée et spirituelle avec quelques moines souriants et curieux de savoir d'où je venais et pourquoi je voyageais seule!
Autre splendeur de Mandalay: la pagode MAHAMUNI. Construite en 1784 pour abriter un Bouddha rapporté du royaume de l'Arakan, c'est la pagode la plus vénérée de la ville. A l'intérieur, c'est débauche d'or et de pourpre. La ferveur populaire est vraiment impressionnante surtout autour du Bouddha. Les hommes se pressent autour de lui pour déposer des petites feuilles d'or qui lui donnent cette allure boursouflée, alors que son visage est lisse et brillant. Il pèse aujourd'hui 2 tonnes: 2 tonnes d'or! La couche d'or sur sa poitrine atteint même parfois 20 cm. Les femmes n'ont pas le droit d'approcher ce Bouddha et prient dans un espace derrière celui des hommes.
Dans les allées de la pagode, on croise des échoppes de souvenirs et des astrologues. Les Birmans sont très superstitieux! Ainsi, il se dit que la conduite se fait à droite avec le volant à droite car ça aurait été décidé par un astrologue proche du pouvoir (pas très rassurant quand le bus double, mais un co-pilote à la fenêtre avertit le conducteur lorsque le passage est libre!). De même, le chiffre bonheur de l'ancien dirigeant de la junte était le 9, il avait décidé de faire des billets de banque qu'avec des multiples de 9. Je vous laisse imaginer le désordre...
Se faire lire les lignes de la main en quelques minutes.
On trouve un peu partout en Birmanie des jarres pleine d'eau avec un petit gobelet et chacun peut se servir!
Une petite fille très appliquée.
Tandis que celle ci est épuisée d'avoir participer à une cérémonie religieuse.
Les cornets de glace ne m'ont pas vraiment tentés...
J'ai fini ma balade de la ville dans un atelier de feuilles d'or pour me rendre compte du travail de patience que cela représente. Pour faire 500 feuilles, un homme tape sur l'or pendant 5h avec une masse de 8 kg. Puis les femmes, avec du talc sur les mains pour éviter que les feuilles ne collent et une spatule en corne, font des petits carrés qu'elles glissent entre 2 feuilles de riz. Une petite feuille d'or coûte 700 kyats soit 1 dollar, soit le prix d'un milk shake banane en Birmanie! Elles m'ont expliqué que c'était parce que les Birmans veulent offrir ce qu'ils ont de plus précieux à Bouddha et tout le monde peut acheter de temps en temps une feuille d'or ainsi.
Super milk shake banane!
Mon séjour à Mandalay prend fin et c'est parti pour 15h de bateau pour me rendre à Bagan.